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C’est enfin LE GRAND JOUR !!!
Après nous être couchés tôt la veille, réveil à 1h15 du matin après une nuit courte mais reposante, malgré le bruit de certaines personnes qui semblaient ne pas supporter l’altitude (je ne serais pas plus précis pour ne pas heurter la sensibilité des plus jeunes). Nous prenons notre petit déjeuner et nous voilà partis en pleine nuit pour une journée des plus mémorables…

Au départ, nous prenons notre temps, mais notre guide nous fait comprendre qu’il veut partir assez vite. En fait, il veut doubler un groupe de 12 anglais. Nous nous dépêchons donc pour partir avant eux. En sortant du refuge, nous avançons dans un grand pierrier dans le noir obscur et sombre, autant dire que l’on n’y voyait rien et c’est dans des moments comme celui là que l’on est content d’avoir un guide. Sans hésiter, Claude nous montre le chemin alors qu’il n’y a aucun sentier, on ne sait même pas dans quelle direction on se dirige. Au bout d’un petit moment, nous rejoignons un chemin. La lampe frontale est plus que nécessaire pour se déplacer dans le noir. C’est d’ailleurs amusant de voir les autres cordées rien que par le gigotement de petites lumières. Plus nous avançons et plus les lumières des cordées derrière nous semblent s’éloigner. Je pense qu’ils ont du avoir du mal à trouver le chemin.

Ce chemin justement commence tranquillement mais vite il devient abrupte. En effet, nous commençons l’ascension de la Pointe du Gouter. A son sommet on doit rejoindre le refuge du Gouter qui est le refuge habituel de la voie normal, mais avant de le rejoindre, il nous faut monter 700m. Nous continuons de suivre le chemin qui suit une arête rocheuse et plus on monte, plus il faut utiliser les mains. Au bout d’un moment, le chemin est complètement assuré par un câble pour s’aider à monter, autant dire que ça monte bien et que cela fait un bon échauffement. D’ailleurs, chose assez surprenante, il fait vraiment bon à cette heure là, il n’y a pas beaucoup de vent et la montée est assez agréable (bien que physique).

Nous arrivons au refuge du Gouter à 3800m et Claude se retourne vers nous et nous dit “on les a bien eu ces anglais !”, ça m’a fait tripper. A partir de là, nous mettons les crampons pour commencer la partie neige. D’autres cordées partent du refuge en même temps que nous et une personne seule nous suit sans vouloir nous dépasser. A partir de là, avec la neige, on voit le chemin à prendre en suivant la trace des autres cordées passées les jours précédents. Encore une fois, on ne voit pas grand chose, on devine que l’on est sur une arête, on devine qu’il y a un petit plateau mais sans vraiment en être sûr (du coup, pas beaucoup de photos pendant la montée). Le début est vraiment tranquille mais les choses commencent à devenir sérieuses pendant la montée du Dôme du Gouter. En effet, celui ci est long et semble vraiment très long. A partir de ce moment là, je commence à sentir les effets de l’altitude. C’est assez difficile à décrire mais pour faire simple on a besoin de respirer beaucoup plus. On a pas de sensation de fatigue dans les muscles mais on est un peu fatigué quand même, comme si on avait envie de dormir. J’avais par moment les yeux qui se fermaient un peu tout seul. Du coup, les pas sont plus durs à faire car il faut en fait y mettre un peu de volonté, cela n’est pas un réflexe. Pendant la montée du Dôme, une cordée nous double. Je me dis que je ralentis vraiment la cordée, Claude allant d’un bon pas (mais c’est normal vu qu’il est habitué) et Francis également qui ne semble pas sentir l’effet de l’altitude. Pour mon cas, je pense que la barre des 4000m est assez significative en terme d’altitude. Ce qui également assez dur dans une ascension comme celle là, c’est que l’on ne voit pas le sommet, même pas la prochaine étape. La seule façon de repérer les reliefs c’est de regarder le ciel. En effet, si le ciel est étoilé comme c’était le cas, on peut voir où il n’y a pas d’étoiles, cela dessine une ombre noire au milieu des étoiles et l’on peut ainsi deviner les reliefs.

Après un certain temps, nous arrivons au sommet du Dôme pour arriver sur un plateau. Cela fait du bien mais il est très rapide à traverser, puis nous attaquons la montée vers le refuge Vallot. A partir de cette montée, la température commence à se faire sentir, disons qu’on sent que l’air est frais mais les efforts suffisent largement à se réchauffer et la petite polaire suffit. En fait, il faut savoir que le moment où la température est la plus basse est juste avant le lever du soleil car cela correspond à la plus longue durée depuis laquelle la montagne n’a pas vu le soleil et donc emmagasiné de chaleur. Nous montons donc en direction du refuge Vallot qui est une petite cabane. Cela permet de s’abriter en cas d’urgence, mais ce n’est vraiment pas fait pour y dormir. Cette montée m’a sembler plus facile que le dôme bien que plus haute en altitude… peut être une question de dureté de neige, peut être une pente moins raide et moins longue… en tout cas, elle est mieux passée. A savoir que dès que la neige est plus molle, les efforts à fournir sont plus durs car il faut faire des marches et ne pas perdre l’équilibre, alors que si la neige est dur c’est moins confortable mais au moins ce sont les crampons qui bossent.

Après le refuge Vallot, nous nous dirigeons vers le Mont Blanc lui même, là on arrive dans le vif du sujet. Fini de s’amuser de faire semblant d’en chier, maintenant ça va être pour de vrai. A ce moment là, on commence tout juste à deviner le relief mais par contre on ne sait pas ce que c’est. On pense voir un sommet mais de là à dire que c’est le Mont Blanc… Nous continuons donc l’ascension en suivant notre guide. Les pas commencent à être assez dur à faire mais c’est surtout dans la tête. On se dit qu’il ne reste plus beaucoup à faire. Toutefois, il ne faut pas faire confiance au relief. En effet, on arrive à la première bosse du Mont Blanc qui est encore loin du sommet et il faut vraiment se dire que ce n’est pas le seul relief qui peut tromper son monde. A ce moment là, le gars qui nous suivait nous demande s’il pouvait s’encorder avec nous mais Claude lui a clairement et simplement dit non, en gros je pense qu’il ne voulait pas prendre la responsabilité d’une autre personne, de ne plus pouvoir nous assurer… et puis si le gars voulait être en cordée il avait qu’à se payer un guide.

La première bosse passée, les couleurs commencent à arriver et l’on sent que le soleil sera bientôt là, ainsi que le sommet du Mont Blanc. A cet instant, nous doublons la cordée qui nous avait dépassé auparavant (quelle satisfaction !). On sent que le sommet n’est plus très loin, mais les pas sont vraiment durs à faire. Je me force à respirer de façon exagérée pour ne pas perdre le rythme et ralentir mais à chaque instant on a envie de faire une micro pause et on a tendance à vouloir s’arrêter… mais non bon sang, c’est le Mont Blanc, faut aller jusqu’en haut. Claude nous indique le temps qu’il nous reste et j’avoue que lorsqu’il l’annonce je ne le crois pas trop. Je me dis qu’il dit cela pour nous encourager mais j’ai l’impression que nous sommes beaucoup plus lent que cela et le temps me semble beaucoup plus long, mais en fait c’est bien ce qu’il annonce. J’avoue ne pas regarder ma montre pour ne pas me décourager. Ma seule idée en tête est d’arriver en haut et à chaque instant je me dis : “ce n’est pas encore fini, il y a surement une autre crête derrière ce que tu vois”, et ça ne rate pas… à chaque fois, ce n’est pas terminer et il y a une autre crête à franchir, cela a du arriver une petite dizaine de fois. Le froid commence à se faire sentir. Je change de gants pour mettre les gros et rien que de laisser les mains à nue, il m’a fallut 10min pour ne plus avoir froid alors que pour le reste impeccable (comme quoi le matos ça joue).
Enfin Claude nous annonce que nous arrivons sur la dernière crête. Le mental était déjà au max mais ça aide quand même. Par contre, cette dernière crête semble longue, vraiment longue. Elle est moins raide que les autres, mais on ne voit pas vraiment le bout et c’est peut être de savoir que c’est bientôt la fin et que bientôt on aura plus d’effort à faire, mais elle est vraiment mentale. A la fois on a du mal à avancer mais à la fois on sait qu’on va arriver au sommet, que plus rien ne pourra nous arrêter. Et là… : C’EST LE SOMMET DU MONT BLANC !!!
Une fois qu’on y est, plus aucun doute : on est au sommet et on est vraiment au dessus de tout. Le soleil s’est levé depuis très peu de temps et on profite des premières lueurs. C’est vraiment magnifique. Les couleurs changent très rapidement. Ce qui est le plus saisissant, c’est cette certitude d’être au dessous de tout le reste. C’est vraiment une sensation extraordinaire que de sentir que tout le reste est plus bas, que tout le reste est plus petit et que l’on est sur le toit de l’Europe. Il n’y a pas une montagne qui semble plus haute ou quelque chose qui semble ressortir. On est plus fort que tout, on a presque une sensation de puissance. En même temps, on a une satisfaction extrême quand on arrive au sommet, on ne profite pas tout de suite du panorama, on ne réalise pas tout de suite ce qui nous entoure on est plus plongé dans une atmosphère d’euphorie où l’on se félicite. On se dit que maintenant on peut mourir. Ce n’est qu’au bout d’un moment qu’on commence à vraiment regarder, que l’on voit qu’il y a une quantité incalculable de sommets, que les vallées s’enchainent les unes derrières les autres et que tous semble lointain. Le paysage est vraiment magnifique mais par contre il faut vraiment être sur place pour ressentir tout cela. Les photos ne retranscrivent pas du tout cette sensation. C’est comme l’ombre du Mont Blanc. Quand on la voit en vrai, on a l’impression qu’elle va jusqu’à l’horizon, que le Mont Blanc peut à lui même apporter le jour ou la nuit.

Passé ce moment d’émerveillement, c’est le moment de s’habiller un peu car le vent est bien présent et encore il parait qu’il n’y en avait pas beaucoup. Ensuite, on prend quelques photos, on profite un peu. Claude nous décrit les différents massifs et sommets. Il nous dit qu’il est bien content de nous, que nous n’avons pas trop trainer, on a mis 1h30 de moins que ce qu’il pensait. Nous aussi on était bien content d’être au sommet. En plus, on était la deuxième cordée à être au sommet, la première redescendant en parapente (ça doit être le pied ça… 3600m en parapente). On est arrivée au sommet vers 7h30, donc on a mis entre 5h – 5h30 pour faire les 1700m de dénivelée.

Bon c’est pas tout, mais maintenant il faut redescendre. On ne reste pas des heures au somment, car même bien habillé on a vite froid lorsqu’on ne bouge plus. Nous voilà donc parti tout droit dans la pente pour redescendre. En gros, on a pas fait dans le détail. Ce qui était amusant dans la descente, c’est de découvrir les endroits par lesquelles on est passé lors de la montée (c’est là qu’on peut prendre les photos ;-) ). Pour faire simple, on descendant la pente complète en courant et dès qu’il y avait un peu de plat, on prenait une photo et on repartait aussi sec. On a croisé un peu de monde, une dizaine de cordée pendant notre descente, mais on a vraiment pu faire l’ascension dans de bonne condition, sans être gêné pendant la montée ou à l’arrivée au sommet.

Nous arrivons au refuge du Gouter où nous enlevons les crampons, puis nous reprenons le chemin. On réalise que ce chemin est vraiment abrupte, mais peu importe, on descend sans perdre trop de temps, puis au bout d’un moment, on arrive au “couloir de la Mort”. En fait, je pensais que ce fameux couloir était un couloir enneigé mais non. C’est en fait le couloir de la Pointe du Gouter. Pendant la montée on l’a traversée sans le voir. De nuit, il n’y a pas trop de danger, mais de jour ce n’est pas là même surtout quand on voit des morceau de rocher de 30m de large qui vole à une vitesse assez impressionnante. On voit de l’autre côté des gens qui venaient de le traverser sans avoir été très confiant. En même temps, nous avions appris la veille qu’un homme non encordé venait de trouver la mort, donc statistiquement, nous devions pouvoir passer sans risque. Claude nous explique comment passer le couloir. C’est lui qui se charge de regarder les rochers et de nous dire quand y aller, nous on regarde où l’on met les pieds et on court quand il nous le dit. A cette annonce, on se dit que ça va bien se passer (enfin on espère)… à ce moment là, un monstre de caillou passe pas loin de nous… juste de quoi rassurer. Une petit accalmie arrive et Claude nous donne le signale. Nous nous engageons dans le couloir et au milieu il nous dit de courir. Nous arrivons de l’autre côté, bien content d’être en sécurité. A partir de ce moment là, plus aucun caillou n’est tomber… genre juste pour nous narguer.

Après une petite marche, nous arrivons au refuge de Têtes Rousses un peu avant midi. Du coup, nous décidons de manger au refuge (encore un bon pic-nic de Claude) et de ne pas rester dormir comme prévu mais plutôt de redescendre tout de suite. C’est ce que nous faisons. Nous commençons à descendre sur un bon rythme. Puis à un moment, nous croisons un groupe, Claude continue, par contre Francis et moi laissons passer. A ce moment là on se regarde tout les deux en voyant que Claude s’est mis à courir et que nous devons le rattraper. On a du mettre 30min à le rattraper, sans être jamais loin de lui mais en devant gagner mètre par mètre. A partir de là, les pieds ont commencé à se faire sentir. Chaque pas faisait mal, on sentait nos orteils écraser sur le bout. Dans la neige, on ne le sentait pas trop car le froid devait un peu anesthésier et la neige est moins dure et absorbait les chocs. En fait, il valait mieux courir, au moins on avait mal moins longtemps. Du coup, nous arrivons vite à l’intersection où nous étions la veille et cette fois nous prenons un autre chemin (le classique) pour redescende. Nous retrouvons le chemin de fer et nous continuons notre descente vers le téléphérique.

Nous sommes arrivés au bout de nos peines vers 14h30. 3000m de dénivelée négative d’un seul coup… difficile de trouver cela ailleurs (en général il y a forcément de la montée sur 3000m). Du coup, les pieds sont en feu, mais bien content d’être arriver au bout. On a du gagner 2h sur la descente en ayant couru. A la fin, Claude nous dit qu’il était bien content pour une fois d’avoir des gens qui pouvait le suivre et qu’il a pu aller à son rythme à lui. Nous on va dire qu’on en a juste chier.

Pour résumer, une course inoubliable avec une satisfaction énorme de pouvoir se dire “je l’ai fait”. Pour moi, ce n’a pas été une course facile en terme d’altitude. Techniquement ce n’est vraiment pas compliquer mais il faut avoir une bonne condition physique. Du coup, en 12h (dont environ 1h de pause à midi), nous avons fait +1700m / – 3000m. De bonnes statistiques.

Après tout cela, une bonne douche et rendez vous pour le débriefing… et oui, il reste encore une journée au stage. Par contre, mes orteils ayant virée au violet et Francis ayant pris froid, nous décidons de faire le lendemain une journée tranquille. Après, avec Francis nous allons dans un restaurant du coin pour célébrer notre exploit avec une bonne raclette, un bon moment de détente pour de vrais guerriers.

Et voici le tracé :

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Télécharger le tracé (.kmz à ouvrir avec Google Earth).

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